Comment tuer une tortue en lâchant des ballons



La saison approchant, vous préparez votre mariage, votre anniversaire, un baptême ou l'inauguration du barbecue et, malgré la promesse que vous vous étiez faite de  rester dans le chic et le bon goût voila qu'un relent romantico-kitchouille vient vous titiller : Et si on organisait un lâché de ballon. ? 

 

Des images vous arrivent déjà, tous en cercle à regarder les petits points de couleur s'éloigner, les enfants courant après pour tenter d'en rattraper, et les dizaines d'iphone immortalisant ce moment. Bon, soyons honnêtes, quelques uns des enfants en larmes tout de même. Mais qu'à cela ne tienne, il ferait beau, un ou deux charmants nuages blancs viendraient habiller le ciel pour le contraste et une légère brise emporterait les ballons au loin vers des destinations mystérieuses. On pourrait même imaginer une jolie petite table avec des stylos de toutes les couleurs pour que les convives puissent écrire des vœux à accrocher au bout des ficelles afin que les ballons les emportent tout la haut...

Tout la haut où au fait ? 

Car une fois qu'ils ont disparu au loin et que tonton Hervé a lancé le "top grillade", ils deviennent bien quelque chose nos ballons. Après quelques recherches, deux destinées aériennes s'ouvrent à eux :

  • Ils montent, ils montent, ils montent... pendant 8 km environ. Puis l'atmosphère exerçant moins de pression, le gaz à l'intérieur se détend, prend plus de place, et tel le bouton de jean devant le cheesecake de trop le ballon éclate. Il se transforme en tout un tas de petits bouts de plastiques (et éventuellement une ficelle) qui retombent en une pluie de plastique colorée. 
  • Ils ratent leur examen d'envol, restent à des hauteurs plus raisonnables et, par porosité, ils se vident lentement de leur air. A l'arrivée il nous reste donc un gros bout de plastique (et toujours notre ficelle).

 

En gros, cela fini abandonné dans la nature. Or, un matériau abandonné/destiné à l'abandon et n'ayant pas de valeur immédiate qu'est ce que c'est ? Par définition, c'est un déchet. Mais forcement, sur le planning de la kermesse, "lâché de déchets" c'est moins vendeur.

 

Le problème c'est qu'un déchet c'est un peu con et ça ne retombe pas dans une poubelle. Dans notre cas cela retombe dans les arbres, au sol et dans la mer (et pour ceux qui n'habitent pas en bord de mer, il suffit que cela tombe dans une rivière pour y finir quand même). Et cela retombe en quantité non négligeable. En moyenne, 1 million de ballons sont lâchés dans le ciel français chaque année. Apparemment le français enferme ses poules dans des cages mais il a l'âme d'un libérateur de ballons. A titre d'exemple, le programme des Nations-Unies pour l'environnement a inventorié les déchets ramassés sur des plages pendant 20 ans. Dedans on retrouve 896000 fragments de ballons de baudruches. Et cela ne concerne que les bouts suffisamment gros pour être retrouvés.

Et c'est la qu'avec nos trois minutes de gloire événementielle on devient un assassins d'animaux qui n'étaient même pas conviés à la fête. Car une fois dans la nature, la faune marine et certains oiseaux sont incapables de les reconnaître comme éléments non comestibles. On en retrouve donc dans les nids, mais surtout plein les estomacs. Sans compter les ravages des ficelles qui s’emmêlent et sont tout aussi ravageuses.

Une envie de constater par vous même ? Balloons Blow propose une galerie très éloquente sur ce sujet : http://balloonsblow.org/photo-gallery

 

Et voilà comment en lâchant nos ballons, on réussit à tuer une tortue, des oiseaux et peut être même un dauphin. On peut alors se demander si cela en vaut vraiment la peine :

 

  • Si vous êtes un tueur en série en devenir ou un sociopathe, la réponse est surement oui.
  • Pour ceux qui tenaient à leurs vœux, mauvaise nouvelle : Toutes les études scientifiques sont formelles : Les 8km au dessus du sol ont été explorés en détail et il n'y a ni paradis, ni ange, ni lutin, ni autre bestiole magique pour lire votre petit papier et faire en sorte que Jean-Hugues réalise qu'il vous aime et largue cette garce de Marie-Charlotte. Vos espoirs calligraphiés sont voués à retomber sur terre et se désagréger avec le temps. On a vu mieux comme symbole.
  • D'un point de vue totalement personnel... C'est super chiant un lâché de ballon non ? Tout le monde est là, à attendre de longues minutes qu'on se décide à donner le top départ. Puis finalement les organisateurs se décident et on regarde du plastique gonflé d'air s'éloigner quelques secondes. Question suspens et émotion on repassera...
  • Pourquoi ne pas organiser un lâché de poubelles ? Tous au bord de la rivière et hop, on balance le contenu de nos poubelles à l'eau. Ca parait stupide ? Pas plus que déverser des ballons dans la nature. Et au moins vous aurez un côté innovant.
  • Pour quelques euros de plus on peut maintenant acheter des ballons biodégradables, la ringardise est sauve ! Sauf que c'est un peu une arnaque. Ok c'est biodégradable mais la réglementation ne précise pas en combien de temps. Autant vous dire que si c'est en 3 ans, notre morceau de plastique a largement le temps d'être boulotté par flipper, franklin ou bibi phoque.

Voilou voilou, on espère forcement que toi, qui lit cet article, tu pencheras vers les combattants des dispersions de baudruches. Et qui sait, peut être même qu'en réfléchissant très fort, on pourra trouver des solutions de substitution comme animations qui ne laisseraient pas de déchets dans la nature. Des idées ?

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